Celui qui pourrissait, par Jean-Pierre Bours

Parution : 1977

Encore les années 70. Sérieux, comment ne pas acheter un livre qui s’appelle demême? C’est ça que j’ai fait. Jean-Pierre Bours a gagné le prix Jean Ray (pour la meilleure œuvre fantastique belge de l’année) en 1977 pour ce recueil-là. L’ami Bours est avocat de profession, pi il trippe sur Dostoïevski pi Faulkner, si ça peut intéresser quelqu’un.

« Que le fantastique soit aussi une disposition d’esprit, un regard privilégié porté sur les hommes et les choses, ce recueil de neuf contes nous le montre avec éclat. Il y a ici certes des déchirures brutales, d’horribles moments, des lueurs d’épouvante, des curieux dédoublements et d’incroyables méprises, mais aussi une quête passionnée de l’identité, une interrogation lancinante sur la difficulté d’être et de vivre – sur les foudroyantes incertitudes de la vie et de la mort. Avec Jean-Pierre Bours, le fantastique est bien ainsi la voix d’un désarroi panique. Davantage : le chant désespéré d’une blessure. »

Cette 4e de couverture-là m’a tentée; je me suis fait fourrer. Un peu, pas trop, mais quand même. J’ai passé à travers du recueil sans vraiment rien feeler. C’est pas mal écrit, c’est pas inintéressant, mais y manque dequoi. C’était une lecture platte. Je vais quand même parler de quelques nouvelles pas si pires.
Celui qui pourrissait : l’histoire d’un gars qui empile les maladies de peau sur la sienne pi qui vire fou. Même qu’il fini par tuer du monde. Pi, à la fin, gros punch : le gars, c’est Jack l’éventreur. Personnellement, je me serais passé de cette finale-là, un peu poche pi pas vraiment utile. Mais les descriptions de ses maladies sont vraiment dégueuses :

« Après trois jours vint la période d‘éruption. Son visage, ses mains, son tronc se couvrirent de papules coniques, dures – rouge sang –, de la grosseur d’une tête d’épingle. Elles contenaient un liquide clair, séreux, qui après huit jours se troubla et devint purulent. Les pustules, cernées d’une aréole inflammatoire, couvrirent le corps, jusque sur la langue et la face interne du larynx. »

Procédure contradictoire : un condamné à mort qui réussi à transférer sa conscience dans le corps du juge qui l’a condamné.
Entre Charybde et Scylla : une histoire de prémonition qui se réalise sans qu’on puisse rien y faire, genre c’est impossible de changer le destin. La structure est intéressante. C’est une des nouvelles que j’ai préférée.
Aujourd’hui l’abîme : la meilleure nouvelle. Le titre est vraiment nice. C’est l’histoire d’un fils de famille foul puritaine qui tombe amoureux d’une pute pi addict au sexe. Le gars fini par devenir transparent pi à errer comme un spectre.

Comme j’ai déjà dit, Bours fait rien de mal avec son recueil, mais il manque un petit quelque chose.
J’ai eu aussi un peu de misère à trouver une ligne directice. Tout ce que j’ai remarqué, c’est que la médcine pi l’anatomie ont une grande place dans les récits, le sexe itou, pi qu’y a quelques personnages avocats ou juges. C’est toute.
Mais : un concept que j’ai ben aimé revient dans deux des nouvelles. C’est l’idée que c’est pas grave d’exagérer une histoire; ça la rend meilleure. Le narrateur dit ça à son interlocuteur :

« Savez-vous que vous me mettez à rude épreuve en m’intimant de m’en tenir aux faits? C’est que j’ai besoin de fabuler un peu pour trousser une histoire, et quelle importance, mon dieu, si des détails en sont imaginés? L’art y gagne tant et la vérité y perd si peu… »

Venant d’un narrateur qui prétend raconter une histoire vraie, ça fucke un peu la vraisemblance. Mais je suis d’accord avec ça : c’est exactement le travail de l’écrivain de sculpter la réalité pour lui donner un certain intérêt. Dequoi demême. Anyway, le message est le même que dans Big Fish, pi moi, je l’ai aimé Big Fish. Même que c’est le meilleur de Tim Burton. Mais c’est pas ça l’important. L’important c’est que j’ai pu grand-chose à dire à propos de Celui qui pourrissait.

Verdict : rien de mauvais dans ce recueil-là, mais rien de ben malade non plus. Je le recommande pas, pi je vais l’oublier assez vite.

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