Dream Home

Réalisation : Ho Cheung Pang
Scénario : Ho Cheung Pang , Kwok Cheung Tsang pi Chi-Man Wan
Pays : Hong-Kong
Sortie : 2010 à Hong Kong, pas encore en Amérique

Le dernier film hongkongnais que j’ai vu, c’est Ebola Syndrome : l’histoire d’un gars qui répand le virus ebola dans toute la ville, entre autres via des hamburgers infectés. C’est donc avec joie que j’ai accueilli Dream home. J’ai pas vu ben ben de films d’horreur asiatiques dans la dernière année, le film a eu des paspires reviews pi le poster est magnifique, facque :

Résumé

C’est l’histoire de Cheng Lai-sheung, une jeune femme travaillante qui économise depuis crissement longtemps pour s’achetr un appartement avec une belle vue sur le port. Sauf que, en 2007, à Hong-Kong, se trouver un appart, c’est presque impossible à cause de l’état pitoyable du marché. Mais son père tombe malade pi Cheng découvre que l’assurance couvre pas les dépenses de l’opération. Entre temps, elle réussit à négocier l’achat de l’appartement de ses rêves; sauf que, finalement, les proprios chokent parce qu’y pensent pouvoir vendre pour plus cher. Cheng pète un plomb pi elle décide de prendre les grands moyens pour l’avoir, son appart.

Critique

Dès le premier plan, on voit que la photo est bonne pi que le cadrage est super léché pi symétrique. On sait que ça va être ben filmé. Le générique est crissement beau : des plans immenses de facades d’immeubles à logement qui débordent de tous les bords pi qui montrent la démesure. Y a aussi beaucoup de jeux avec l’objetif, comme par exemple des reflets ou en filmant à travers une fenêtre ou un grillage.
Dès la première scène, on voit que le gore sera pas doux : le gars se fait serrer un tie-rap autour de la gorge pi y essaye de la couper avec un exacto, ce qui marche pas tant, finalement. C’est comme ça tout le long : du gore vraiment inventif pi ben faite, dans le genre qui fait grimacer pi gigoter sur son siège. Rien de choquant, quand même, mais du dégueux en masse. J’ai particulièrement aimé les coups de couteau dans le dos qui ressortent dans le torse : je comprend pas trop comme c’est faite, mais c’est cool.
Ce qui est intéressant, dans ce slasher-là, c’est la structure : au lieu d’être linéaire comme tous les autres, les meurtres ont tous lieu dans la même soirée. Cette soirée-là est entrecoupée de flashbacks qui « expliquent » le massacre. C’est cool parce qu’on sait dès le début du film que la fille va tuer du monde, sauf qu’on comprend pas pourquoi elle va le faire. C’est un autre type de suspense.
Les dialogues sont la plupart du temps assez bons pi le jeu des acteurs est juste parfait pour un film de ce genre-là, qui demande pas vraiment des performances hors de l’ordinaire. Josie Ho, l’actrice principale, fait une ben bonne job, en plus d’être la plus jolie slasheuse depuis la mère de Jason.
Une petite affaire qui m’a dérangé : l’humour. Le premier tiers du film est complètement dénué d’humour. Après ça, de temps en temps, on a droit à une blague genre à la Hatchet. C’est pas que les jokes sont mauvaises (le gars avec les intestins à terre qui veut pogner une dernière poffe de son joint qui est malheureusement éteint, pi quand finalement à la fin y se fait tirer dans la tête, de la fumée sort de sa bouche), mais juste que c’est pas assez appuyé. Au lieu d’être une comédie d’horreur, c’est un film d’horreur sérieux avec des jokes de temps en temps. Ça brise un peu le ton, j’ai trouvé.

Analyse

Vite demême, on voit une critique de la situation de la spéculation immobilière à Hong-Kong (pi aux États-Unis, aussi). Mais ça va un peu plus loin que ça dans la dénonciation du capitalisme. Vous me reprendrez si je me trompe : quand Cheng était jeune, sa famille s’est fait sacrer dehors de chez eux pour construire des grosses tours à habitations. Quand elle est devenu grande, ces habitations-là sont devenues inabordables, ou presque. Malgré tous ses efforts pour récupérer ce qui lui avait été volé, Cheng réussit quand même pas à réaliser son rêve : avoir son appart. Le capitalisme cause nos problèmes pi nous permet même pas de les régler. Facque elle décide de tuer plein de monde dans l’immeuble pour que le prix baisse. C’est un retour à la loi de la jungle, au chacun-pour-soi prôné par le néo-libéralisme; le meurtre apparait donc comme la manifestation la plus pure du capitalisme. Malgré tout, à la fin, quand on constate avec étonnement que son plan a fonctionné, on apprend que la crise aux États-Unis vient d’éclater, ce qui vient fucker les plans de Cheng, qui s’était fait dire que c’était un bon moment pour investir. Ainsi, malgré tous ses efforts, l’homme moderne est constamment menacé par l’épée de Damoclès qu’est la loi du marché, comme si on pouvait pas échapper à sa « main invisible ».
Mais c’est pas tout : y a aussi une critique du patriarcat. Dès le début, on constate que Cheng est opprimée par son chum, qui pense juste à la baiser, pi par son père, qui a des idées très précises sur ce que devrait être une femme. Tout le film apparait alors comme une émancipation du joug masculin qui mène l’héroïne au meurtre pi au parricide. Le motif du phallus revient tout le long du film, la plupart du temps sous la forme de huges building qui pointent vers le ciel, mais aussi, plus explicitement, dans une scène d’émasculation plutôt évocatrice. On remarque aussi que ce qui drive Cheng, c’est l’idée d’avoir une « chambre à elle », ce qui renvoit à l’essai de Virginia Woolf sur la condition féminine. Elle dit que la femme va être libre le jour où elle va avoir un espace privé pi personnel. Facque Cheng se bat pas pour un appart, mais pour sa liberté. Sauf que pour atteindre sa liberté, elle s’approprie certains attribus masculins; dans cette optique-là, le fait qu’elle ait utilisé les outils de son père pour commettre les meurtres est très significatif. D’ailleurs, après avoir fait son massacre, symbole de son émancipation, elle devient spure d’elle pi dominante, comme on peut le voir dans sa conversation au téléphone avec son agent immobilier. En s’appropriant une certaine masculinité, elle renverse le schéma dominant/dominé dont elle était victime depuis le début. Elle devient un mâle alpha. Donc, la seule façon de se libérer de la domination masculine, c’est en devenant soi-même un homme.

Verdict

Recommandé. C’est ben filmé, ben joué, y a du bon gore pi les meurtres sont inventifs. Un bon divertissement sur fond de commentaire social.

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