Réveil VI

Sommeil, néant. Puis un écho, une main pointe l’éveil. Le bruit inonde l’escalier et monte jusqu’à moi. D’un coup, regard fluide, toujours les rugissements. Tout en bas, le métal torturé gémit. Tressaute, résiste. Cœur aveuglé. Le martèlement est régulier; insistant. 3h15. Rapidement, je gagne la porte; ma clé éloigne le danger. Relâchement. Mais on cogne, on cogne. En pleine nuit, tout semble planer sur nos têtes. Mes regards se font flous, mes pupilles hésitent.
À la fenêtre, contreplongé : deux corps sur le pavé. La rue éteinte porte loin, résonne à l’horizon. Le vent, puis rien. Visages.
– On peut entrer?
Les étoiles s’estompent, la lune se voile. La nuit tombe d’une teinte. Une fumée blanche gèle mes poumons, mes pores se contractent. Visages d’enfants, visages de mort. Le néant flotte dans leurs regards, oriente son maelstrom sur moi. Les deux petites silhouettes lèvent la tête. Elles savent.
– On peut utiliser les toilettes? S’il-vous-plaît?
Porte en métal, mince porte en métal. Les yeux trop lourds continuent leur ascension, me prennent à la gorge. Chasseurs, dans la nuit ils rôdent, se répandent. Corps d’enfants, corps d’emprunt. Prédateurs. Des ombres qui me cherchent, moi. Agir; jouer la comédie.
– Désolé.
– S’il-vous-plaît!
Fenêtre muraille. Leurs voix tintantes se perdent au dehors, sillonnent le verre en grinçant. Des yeux d’encre, et mon souffle silencieux. Les coups reprennent, sourds, affamés, longeant les heures. Je veille, fait le mort; animal en détresse. Mon cœur calque les chocs, superpose son action aux martèlements incessants.
Puis, cœur libéré. Que le vent entre les immeubles, le sommeil de ma blonde. L’obscurité s’apaise, la lune refait surface; douce résurrection. Le nuit reprend sa place.
La rue, déserte. Et légère. Miraculée.

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